
La rue Mercière traîne le boulet d’une réputation de piège à touristes, lié à son succès. Car une des lois cachées de l’univers veut que les mouches se ruent en masse et inlassablement vers les pièges tue-mouche. Les touristes sont réputés plus intelligents, ont une espérance de vie plus longue, mais ils agissent de même. Pourtant, les mauvaises adresses sont de plus en plus rares. On peut remercier Tripadvisor qui, à défaut de subtilité, a fait un gros ménage. Les bonnes adresses, quant à elles, prospèrent.
C’est le cas de Casabea, qui malgré une grosse capacité d’accueil, en quelque sorte le paquebot Mercière, sert une cuisine de brasserie niveau supérieur. Les stars du moment sont de sortie sur le lieu de tournage. Burrata, gravlax de saumon, poulpe et tataki de bœuf sont les doubles comestibles des Virginie Efira, Gilles Lellouche et Pierre Niney de la restauration actuelle. On les voit partout. Seulement, il y a une question de degré d’interprétation. Le chef de Casabea, Surendra, creuse le goût et les détails. L’intervention de seconds rôles de caractère comme les jeunes pousses de petit pois (bon comme du petit pois mais en tige), le kalamansi (agrume entre la mandarine et l’orange amère), le kumquat (autre agrume plus doux), la marjolaine, se concentrent vers le même objectif : faire joli et bon.
Le filet de bar vapeur, qui attirera nécessairement les angoissés du maillot de bain, constatant un peu tard qu’un hiver à la crème les a équipé d’une bouée incorporée, a la bonne idée de se faire escorter par des tellines, ces petits coquillages à peine plus gros que l’ongle du pouce. Le gravlax de saumon à la bonne texture, à la fois ferme et fondant, est relevé par un jus de grenade. Même les frites qui accompagnaient étrangement le « ceviche de thon à l’exotique » (plutôt ambiance gros cubes sucré-salé que acide et piment perforant) sont traitées avec le sérieux crispy qui convient.
Le restaurant, en angle stratégique, se répand bien sûr en terrasse. Mais on préfère l’intérieur, plutôt chic, élégamment meublé, agréablement aéré, avec vue sur le bar, élément important du lieu qui dispense une grosse carte de cocktails. Pour être placé, on est prié de patienter au point d’accès à l’entrée, comme dans les restaurants américains. Le service est de la même tessiture outre-atlantique. On est très bien reçu. On a juste trouvé que notre dessert en forme de framboise géante, ne laissant aucun doute sur ce qui se cache à l’intérieur, était un tantinet trop sucré. On nous assuré que c’était le seul, à charge de revoyure avec « coco Bea » ou la « cabosse Saint-Domingue ».
Casabea. 5 rue de la Monnaie, angle rue Mercière Lyon 2e. 04 78 37 90 80. Fermé dimanche. Carte : compter entre 35 et 55 euros. Cocktails : 10 et 12 euros. Photo : Maxim Gruss / Exit Mag.