Sortir à Lyon
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André Marcon, un grand acteur dans En atten­dant Godot vu par Alain Françon

André Marcon joue En attendant Godot mis en scène par Alain Françon.
André Marcon interprète En attendant Godot dans la mise en scène inédite d'Alain Françon à Fourvière.
C’est un de nos acteurs préfé­rés au théâtre. André Marcon vient jouer pour la première fois Beckett aux Nuits de Four­vière, mis en scène par un maître, Alain Françon. Tout en tour­nant la jour­née avec Xavier Gian­noli une série dont Gaspard Ulliel aurait dû être le héros. Conver­sa­tion avec un grand monsieur.

C’est la première fois que vous jouez du Beckett ?

André Marcon : “C’est quasi­ment une première. En fait, je suis origi­naire de Saint-Etienne, comme Alain Françon, et nous avions joué Fin de partie de Beckett quand nous étions tout jeune, à vingt ans, Françon jouait aussi. Ensuite, je ne sais pas pourquoi, je ne me suis jamais retrouvé à jouer du Beckett effec­ti­ve­ment…

Est-ce un théâtre parti­cu­liè­re­ment diffi­cile, notam­ment dans En atten­dant Godot ?

Tout est diffi­cile ! C’est vrai que c’est une pièce assez inti­mi­dante, qui a fait beau­coup parler à sa créa­tion. Mais main­te­nant que nous avons commencé les répé­ti­tions avec Alain, je ne pense pas qu’elle soit plus dure qu’une autre, au contraire. Il s’agit de quatre person­nages, une chaise, un arbre, rien n’est plus simple ! Il y a une forme d’évi­dence, et on s’at­tache avant tout à la grande huma­nité qui se dégage des person­nages, à leurs rela­tions. On tenait à rester dans quelque chose de très vivant, plutôt que de vouloir intel­lec­tua­li­ser l’ab­surde. Et la pièce est très claire, quand on l’in­ves­tit.

« Je joue Estra­gon, un person­nage touchant par sa candeur, voire sa quasi-idio­tie ! »

ANDRE MARCON

Vous pouvez tout jouer au théâtre, de pères qui inspirent la crainte jusqu’à la tendresse d’une femme chez Yasmina Reza. Quel rôle jouez-vous ici ?

Je joue Estra­gon, un person­nage touchant par sa candeur, voire sa quasi-idio­tie mais sympa­thique ! Je ne choi­sis pas de faire ceci ou cela, il faut s’aban­don­ner, s’ou­blier devant le rôle au théâtre, et j’ai passé l’âge du narcis­sisme ! (rires) Mais je dois dire que c’est très rassu­rant pour moi d’avoir un grand metteur en scène comme Alain Françon pour porter cette pièce. C’est un perfec­tion­niste d’une très grande préci­sion, il a une grande exigence vis-à-vis du texte mais aussi beau­coup d’écoute.On travaille dans la confiance réci­proque la plus totale, c’est une grande joie ! 

Il en faut pour monter sur scène tous les soirs ou presque, vous déga­gez beau­coup de séré­ni­té…

Bien sûr, j’adore mon métier, mais il ne faut pas croire qu’on y va tous les jours en sautant de joie ! On attend ce rendez-vous de 20h avec anxiété, toujours les jours, c’est fati­guant, voire acca­blant parfois, c’est une vie assez absurde quand on y pense… C’est beau… et acca­blant !

Vous êtes pour­tant un comé­dien né qui a eu cette voca­tion très tôt…

Parce que je ne sais rien faire d’autre ! J’ai débuté à 15 ans comme figu­rant pour Jean Dasté à Saint-Etienne, ensuite il y a eu la rencontre avec Alain Françon et la compa­gnie du théâtre éclaté à Annecy, puis les choses se sont enchaî­nées. ça me va très bien de ne pas avoir eu à me poser trop de ques­tions. C’est un métier suffi­sam­ment contrasté psychique­ment et physique­ment pour ne pas en rajou­ter !

« Nous avions débuté le tour­nage avec Gaspard Ulliel pour la série Tikkoun, son acci­dent a été un choc. »

ANDRE MARCON

Vous tour­nez de plus en plus, vous étiez dans Margue­rite ou Illu­sions perdues de Xavier Gian­noli notam­ment. Le cinéma reste une récréa­tion pour vous ou plus que ça ?

Je suis juste­ment en train de tour­ner pour la troi­sième fois avec Xavier Gian­noli une nouvelle série pour Canal plus, Tikkoun. Nous avions débuté le tour­nage avec Gaspard Ulliel avant que Niels Schnei­der ne le remplace, je venais de tour­ner avec lui juste avant son terrible acci­dent de ski. C’était un choc. Nous tour­nons jusqu’en septembre pour 8h de film, et heureu­se­ment Alain Françon a la gentillesse de me lais­ser quelques jours pour tour­ner ! J’aime beau­coup le plateau de cinéma, c’est comme une ruche, un état dans l’état. Les choses vont vite et passent vite, on ne s’in­ves­tit pas à perte de vue dans un rôle pendant des semaines et des semaines. De ce point de vue-là, c’est effec­ti­ve­ment une récréa­tion pour moi.

En atten­dant Godot vu par Alain Françon (André Marcon à gauche).

Votre voix est recon­nais­sable entre toutes, avec une grande musi­ca­lité. Vous pratiquez aussi la musique ?

Non, c’est le grand regret de ma vie ! J’au­rais adoré jouer d’un instru­ment. Mais j’en écoute énor­mé­ment, et plus que ça, les inter­prètes me fascinent, y compris dans ce qu’ils disent de leur métier. Il m’ar­rive souvent de noter leurs phrases en atten­dant des musi­ciens parler. Il y a la même démarche de servir une œuvre.

La musique, on la retrouve parti­cu­liè­re­ment dans le phrasé de Beckett, comme une comé­die musi­cale parlée ?

Oui, c’est une véri­table parti­tion. Il y a toujours un fond musi­cal au théâtre. On est maître de l’in­ter­pré­ta­tion le temps d’une soirée, mais la musique est toujours là, elle nous dépasse !”


En atten­dant Godot de Samuel Beckett avec André Marcon. Mise en scène Alain Françon. Du jeudi 16 au dimanche 19 juin à 22h au petit théâtre de l’Odéon des Nuits de Four­vière, Lyon 5e. De 13 à 26 €.